Les populations d’ours polaire au Canada

La banquise – dont dépend l’ours blanc pour sa survie – fond au rythme de 11 % par décennie. Autrement dit, l’habitat essentiel des ours est en péril. À mesure que l’Arctique se réchauffe, changements climatiques obligent, cette tendance fait naître une menace sérieuse pour l’ours blanc, particulièrement le long de la frontière sud de son territoire actuel.


Ours blanc dans l’aire de gestion de la faune Churchill (C) Jacquie Labbatt/WWF-Canada
De nouvelles études sur les populations
Le Service canadien de la faune – prédécesseur d’Environnement Canada – a mené pendant plusieurs décennies des études de surveillance à terme de la sous-population d’ours blanc dans l’ouest de la baie d’Hudson. La plus récente estimation de la population effectuée dans cette région s’est appuyée sur les données colligées entre 1984 et 2004, et a été publiée en 2007. Le WWF est fier de son apport à ces travaux scientifiques très pointus.
En 2010, deux nouveaux projets d’estimation des populations ont vu le jour dans cette même région. Le premier prévoyait un levé aérien mené par le gouvernement du Nunavut, et le deuxième, mené par Environnement Canada, devait se dérouler suivant les techniques traditionnelles de capture et de marquage. Le levé aérien consiste à repérer des ours du haut d’un avion ou d’un hélicoptère le long d’un tracé coupant transversalement une zone donnée, qui sert d’échantillon pour déterminer la taille de la population dans l’ensemble de la région. Le travail de capture et marquage consiste à capturer des ours, qui sont mesurés et marqués, puis de les capturer de nouveau après un certain temps, aux fins du calcul de ratios et de l’estimation, assez juste, de la taille de la population totale.
Voyant là une occasion unique de comparer leurs méthodes, et compte tenu de la probabilité d’obtenir des résultats plus ou moins divergents, et des sensibilités d’ordre politique et culturel entourant l’ours polaire, les deux équipes ont convenu de collaborer et de publier conjointement leurs résultats en 2012, et d’exposer le pour et le contre de chacune des méthodes utilisées.
Le gouvernement du Nunavut a publié récemment un sommaire des résultats du levé aérien de son équipe, et nous attendons les résultats d’Environnement Canada au cours de l’été. Aucune des études – pas plus celle du gouvernement du Nunavut que celle d’Environnement Canada – n’a été vue par des pairs ni n’a été publiée, et il serait donc prématuré de tenter la moindre interprétation de conclusions qui sont encore à venir.
Les résultats du levé aérien de 2011 ne montrent aucun changement notable* du nombre estimatif total d’ours blancs dans l’ouest de la baie d’Hudson par rapport à la plus récente estimation effectuée par capture et marquage, mais on ne sait pas encore bien si une comparaison de ces deux méthodes est pertinente et significative. Mais nous avons noté un résultat qui est inquiétant : on n’a recensé que 22 oursons d’un an – nés en 2010, donc – parmi les 701 ours dénombrés. Il s’agit d’un nombre très faible par rapport aux résultats d’études antérieures menées dans cette région et ailleurs.
*Par rapport à la plus récente estimation, réalisée en 2004, par capture et marquage, de 934 ours (intervalle de confiance de 95 %, 794-1076), le levé aérien de 2011n’a pas relevé de changement notable du nombre d’ours blancs dans la zone ouest de la baie d’Hudson – son estimation est de 1013 ours (intervalle de confiance de 95 %, 717-1430).
Au WWF, nous avons très hâte de voir les résultats de la nouvelle analyse de population par capture et marquage (même méthode que celle utilisée précédemment) entreprise en 2011. Une fois que nous aurons en main toutes les données, nous pourrons les utiliser pour évaluer l’état de santé de la sous-population de la région ouest de la baie d’Hudson, déterminer si les deux méthodes utilisées se prêtent de manière pertinente à l’exercice de comparaison, et examiner les forces et faiblesses de chacune.
D’ici l’été prochain, nous devrions disposer de deux nouveaux rapports sur les populations d’ours. Espérons avoir accès à toutes les données disponibles utilisées par les gouvernements et les décideurs responsables des mesures visant à réduire les pressions exercées sur les ours polaires et autres espèces vivant des glaces.
L’importance de la sous-population de la zone ouest de la baie d’Hudson
La sous-population de la zone ouest de la baie d’Hudson vit aux limites sud de la banquise arctique canadienne et, tout comme la sous-population du sud de la baie d’Hudson en territoire ontarien, il s’agit de la population d’ours blancs la plus méridionale dans le monde.  Ces ours sont donc les plus touchés par les impacts actuels du réchauffement climatique, dont le premier est évidemment la fonte de la banquise.
Nous savons que le rythme accéléré et sans précédent de la fonte de la banquise – particulièrement la fonte prématurée au printemps – pose des difficultés (qui sont bien documentées) pour les espèces sauvages et les humains dont la survie dépend de la banquise depuis des milliers d’années. Les données sur le recul de la banquise des 30 dernières années nous permettent de faire le lien avec les données sur le déclin de la santé des populations d’ours polaires, notamment la survie des oursons et la condition physique générale (pour en savoir plus sur la question, consultez ces graphiques).
Voilà les effets du réchauffement rapide du climat, qu’alimentent nos émissions de gaz à effet de serre. N’est-ce pas là un rappel de notre responsabilité à tous d’agir pendant qu’il en est encore temps, et de nous tourner résolument vers l’objectif de 100 % d’énergies renouvelables d’ici 2050?