Madame la première ministre Clark, sachez que les oléoducs ne se monnayent pas.

Lundi dernier, Mme Christy Clark, première ministre de la Colombie-Britannique, a fixé cinq « conditions minimales » à remplir pour que la province étudie la possibilité du passage de tout nouvel oléoduc sur son territoire. Une de ces conditions – que la C.-B. obtienne sa « juste part » des redevances, étant donné que la province devra assumer la quasi-totalité des risques d’un tel projet – a davantage retenu l’attention des médias. Mme Clark a également affirmé que les gouvernements et l’industrie pétrolière doivent investir afin de faire du Canada un « chef de file mondial » en gestion des déversements pétroliers, sur terre et en mer.
À priori, on dirait que madame la première ministre ne mâche pas ses mots. Mais en fait, tout cela ne veut pas dire grand-chose. Cependant, ces affirmations passent complètement à côté de la question de fond.
Qu’est-ce que cela signifie d’être le chef de file mondial en prévention, réaction et nettoyage de déversements pétroliers? Pas grand-chose quand on sait que notre feuille de route à ce jour n’établit que le nettoyage efficace d’un déversement de pétrole brut en mer peut très bien récupérer aussi peu que 15 % du pétrole perdu. Ainsi, en Alaska, 20 ans après la catastrophe de l’Exxon Valdez, les écosystèmes marins ne se sont toujours pas rétablis, et ce, sur une superficie dépassant celle de toute la côte britanno-colombienne.
Imaginons l’étendue des dégâts
Légende :

  • La zone rouge du haut représente la zone des écosystèmes côtiers de l’Alaska qui ne se sont pas encore rétablis depuis la catastrophe de l’Exxon Valdez survenue il y a près de 20 ans. (Source : département des ressources naturelles de l’Alaska, 2006).
  • La zone rouge du bas délimite la même superficie le long des côtes de la Colombie-Britannique.

Or, le nettoyage de bitume dilué – un mélange de gaz toxiques qui peuvent être dangereux pour la santé pendant plusieurs jours, et de bitume lourd qui tombe et se dépose au fond de l’eau – est une opération encore plus complexe que celle du nettoyage de pétrole brut. Il n’existe pas à l’heure actuelle de technique qui permette de nettoyer et de restaurer un écosystème endommagé par un déversement de bitume dilué. Et il n’y a pas de « juste part » de redevances sur Terre qui puisse compenser la perte des écosystèmes de la côte Nord et de la région du Grand Ours, l’un des écosystèmes les plus riches et spectaculaires sur la planète.
Est-ce que devenir un chef de file mondial de gestion des déversements de pétrole, ça ne devrait pas être savoir identifier les endroits où de tels déversements ne doivent pas avoir la moindre possibilité de survenir? Le pays du Grand Ours est un de ces endroits. On ne veut pas de pétrole ici. Jamais. Pas pour tout l’or au monde.
Joignez votre voix à la nôtre et à celle des Premières Nations côtières et devenez vous aussi un Citoyen pour la protection du Grand Ours.