Les aventures de l’Arctic Tern vers le Dernier refuge de glace – du 19 au 26 août

Écrit par Valentine Ribadeau Dumas, deuxième officier et directrice de la logistique et de la science
L’équipage de la 2e étape nous a quittés à fjord Grise (leur avion ayant eu seulement quelques heures de retard causé par la mauvaise météo des jours précédents) et la même journée, nos 4 nouveaux invités nous ont rejoints : Martin, Vicki, Edward et Sophie. Le bateau est de nouveau rempli à ras bord : essence, eau, produits frais (ou en tout cas, ce qui est disponible a l’épicerie du coin!) Pour leur première nuit à bord, le bateau roule un peu au mouillage, une sensation peu commune pour nos terriens qui ne dorment que d’un œil. Nous partons dès le lendemain vers l’île Coburg. Nous y sommes passés à l’aller, mais nous n’avons pu nous y ancrer à cause des vents forts. Deuxième essai (dans une autre baie) et franc succès : une baie abritée, un ancrage parfait, un paysage superbe, un glacier tout près, tout y est. Nous décidons donc de rester là pour la journée (20 août). Le planning s’organise : randonnée le matin sur l’ile, sieste et préparation du départ dans l’après-midi. Cet endroit est magnifique, nous partons à cinq grimper sur les bords d’un glacier. Arrivée sur la plage, des traces d’ours évidentes semblent nous accueillir, « vieilles d’environ une semaine » selon certains d’entre nous. Marcher sur un glacier donne des sensations particulières : il semble presque toujours en mouvement (alors que celui-là ne l’est plus), l’eau ruisselle à l’intérieur et en surface partout, tout le temps, on se sent un peu en apesanteur, flottant à la surface de la glace… Expérience assez unique!

Escapade sur un glacier, île Coburg

Nous partons le soir même vers le Sud. Après plusieurs mois à grimper vers le Nord, nous faisons maintenant cap inverse : le Sud! Direction l’île Devon. Nous la contournons par l’est. Quelques arrêts sur la route : Bethune Inlet (à l’est) et Dundas Harbour (au sud). Le premier nous offre nos premières observations de boeufs musqués. Dans le second (quelques dizaines de kilomètres plus loin) quelques morses nous attendent bien calés sur leur rocher et relativement imperturbables! L’île Devon a un air du sud : plus de végétation déjà, quelques animaux, une belle température, un petit goût presque tropical pour nous!

Morses, havre Dundas, Nunavut

Nous sommes déjà le 22 août, notre prochain rendez-vous est le 30 à Pond Inlet, nous partons donc le lendemain vers Arctic Bay. La traversée du détroit de Lancaster se passe sans problème. Nous en profitons pour prendre des échantillons pour Sophie, notre scientifique à bord. Elle a besoin d’échantillons d’eau à la surface, à 50m, à 100 m et à 200 mètres de profondeur, la même procédure que Paul lors de la 2e étape. C’est parti, tout le matériel est sorti, chacun à son poste et on envoie la Bouteille Niskin à l’eau. Après environ deux heures, les « Ziplocs » sont pleins d’échantillons d’eau, que Sophie filtre calmement. Elle espère y récolter des coccolithophores, un genre de microalgues étudiées pour leur sensibilité a l’acidité des océans.
Il est d’ailleurs temps de vous présenter aussi le nouvel équipage de la 3e étape :
Martin Von Mirbach et Vicki Sahanatien font partie de l’équipe WWF : Vicki est une nouvelle recrue en charge du bureau WWF à Iqaluit. Elle sera donc le contact privilégié entre les communautés et cette ONG. Edward Struzik est journaliste et écrivain, il parcourt l’Arctique depuis plus de 30 ans à travers toutes sortes d’expéditions et nous les raconte via plusieurs journaux. Sophie, comme mentionné précédemment est notre scientifique, mais aussi notre 2e Française à bord.
Voilà pour les présentations officielles… Après quelques jours sur un bateau, nous connaissons vite les petites habitudes de chacun : Martin a besoin de son café dès le réveil, inutile de demander quoi que ce soit avant… il ne parlera que de ça! Vicki prie fort pour que nous ayons de la bonne météo, Ed nous enchante avec ses histoires venues de tous les coins de l’Arctique et Sophie nous invente quelques mots d’anglais utilisant le mot français (le dernier est « Gilet » – prononcé « Djilèètte » – pour dire « lifejacket »). La routine est réinstallée à bord : chacun a son tour de cuisine (les hommes ayant fait des pâtes à la tomate 4 fois, nous avons maintenant à bord un veto sur ce menu…) et chacun a son quart de veille en route ou a l’ancre.
Arrivée à Arctic Bay le vendredi 24, l’équipe du WWF part à terre pour rencontrer des membres du hameau, responsables du village. L’équipage s’affaire à trouver de l’eau, du diesel, remplir les réservoirs, nettoyer un peu le bateau, une habitude pour nous maintenant! Les gens d’Arctic Bay sont très accueillants, ils nous attendent même sur la plage pour nous demander ce dont nous avons besoin. Merci tout particulièrement à Paul et Colin de la GRC (Gendarmerie Royale du Canada) pour leur aide précieuse! La météo nous cloue ici pour une journée, nous en profitons donc pour nettoyer l’équipage : douche au programme à l’hôtel du coin, un bonheur de profiter d’une grande salle de bain! Les enfants du village veulent venir à bord, deux par deux, nous en amenons certains, malheureusement impossible de tous les contenter… on devrait rester 15 jours… 200 enfants pour 800 habitants ici!

Arctic Bay, Nunavut

Départ ce matin (26 août) vers le Nord, pour s’approcher tranquillement de Pond Inlet. La météo des prochains jours n’est pas très bonne pour nous, nous ferons donc des petits sauts de puce entre ici et Pond inlet.