Le Népal, champion du braconnage zéro

Le Népal, ce petit pays de la région de l’Himalaya qui se compare lui-même à un igname – un légume racine rappelant la patate douce – coincé entre l’arbre et l’écorce, la Chine au nord et l’Inde au sud, a néanmoins réussi tout un exploit : 365 jours, une année entière, sans braconnage de rhinocéros, tigre ou éléphant… et deux fois plutôt qu’une, car l’exploit réalisé en 2011 s’est répété en 2014!

Emily Giles, du WWF-Canada, participant comme bénévole au travail de l’équipe locale, et les membres de l’équipe du WWF-Népal au cours d’une opération de contrôle des tigres dans le parc national de Bardia, Népal. © Emily Giles/WWF-Canada
Emily Giles, du WWF-Canada, participant comme bénévole au travail de l’équipe locale, et les membres de l’équipe du WWF-Népal au cours d’une opération de contrôle des tigres dans le parc national de Bardia, Népal. © Emily Giles/WWF-Canada

Ce mois-ci, le Népal accueillera le tout premier symposium consacré à l’objectif braconnage zéro. Des délégués de plus de 13 pays asiatiques et représentants d’organismes de conservation, de corps policiers et de services des poursuites, discuteront ensemble des pratiques, outils et technologies mis en œuvre pour contrer le braconnage.
Le Fonds mondial pour la nature s’intéresse aux leçons que le monde peut tirer de l’expérience népalaise en matière de lutte contre le braconnage.
Conservation
Au Népal, la conservation de la biodiversité – d’une grande richesse dans ce pays – figure à l’avant-plan du programme national. À preuve, ce petit pays compte 10 parcs nationaux, 3 réserves fauniques et 6 zones de conservation couvrant près de 21 000 km2, ce qui représente 23 pour cent de la superficie totale du pays. Le Népal et l’Inde se partagent également une zone appelée Terai Arc Landscape, qui regroupe onze écosystèmes et représente l’une des régions biologiques les plus importantes de la planète, et abrite tigres, rhinocéros et éléphants.

Vue spectaculaire de la zone de conservation du Kangchenjunga, à l’extrême est du Népal. © Susheel Shrestha/WWF Nepal
Vue spectaculaire de la zone de conservation du Kangchenjunga, à l’extrême est du Népal. © Susheel Shrestha/WWF Nepal

Détermination
Le leadership du Népal en matière de protection de la nature a pris diverses formes, et se déploie par le truchement d’organismes comme le Comité national de protection des tigres, que préside le premier ministre du Népal, le Comité de coordination de la lutte contre la criminalité liée aux espèces sauvages que dirige le ministre des Forêts et de la Conservation des sols, avec l’apport d’agences de sécurité et d’application des lois – la police et l’armée népalaises. Quant au bureau de contrôle de la criminalité liée aux espèces sauvages, organisme représenté par les agences d’application des lois pouvant aider à contrôler la criminalité liée aux espèces sauvages, il compte maintenant 16 unités régionales qui contribuent grandement à une lutte efficace contre le braconnage et la criminalité liée aux espèces sauvages.

Équipe formée de gardiens du parc national et de militaires au cours d’une patrouille anti braconnage dans le parc national de Bardia. © Nabin Baral/WWF Nepal
Équipe formée de gardiens du parc national et de militaires au cours d’une patrouille anti braconnage dans le parc national de Bardia. © Nabin Baral/WWF Nepal

Communautés
En 2008, le gouvernement du Népal avait déjà confié près du tiers – environ 28 pour cent – du territoire forestier aux communautés locales qu’il a chargées d’en assurer la gestion, une approche qui a permis d’assurer la sauvegarde des forêts et de la faune qui les habite, et de combattre la pauvreté des populations. Les unités locales de lutte contre le braconnage, créées initialement pour juguler le braconnage des tigres et des rhinocéros, se sont rapidement engagées dans la surveillance du commerce illégal d’autres espèces animales et végétales. Aujourd’hui, le Népal compte plus de 400 unités au travail à travers le pays, qui patrouillent les zones importantes comme les corridors fauniques et sont de précieuses sources d’information sur les activités illégales.
Le WWF-Canada appuie directement les efforts que mène le WWF-Népal pour former et engager les collectivités en vue de la surveillance des populations de tigres dans les zones tampons du Terai Arc Landscape. Cette initiative originale donne aux populations locales du Népal le pouvoir de superviser elles-mêmes leurs ressources naturelles en mettant à profit les techniques de surveillance des tigres et de leurs proies.

Collets que vient de récupérer l’équipe locale de lutte contre le braconnage dans le corridor faunique de Khata. © Susheel Shrestha/WWF Nepal
Collets que vient de récupérer l’équipe locale de lutte contre le braconnage dans le corridor faunique de Khata. © Susheel Shrestha/WWF Nepal

Coopération
La criminalité liée aux espèces sauvages n’a pas de frontière. Aussi le Népal n’est-il pas uniquement une « source » d’espèces sauvages recherchées, mais il sert également de voie de transit vers la Chine. Mais le Népal dispose de divers moyens de lutter contre cette forme transnationale de criminalité : protocole d’entente avec la Chine, résolution avec l’Inde sur la conservation de la biodiversité et le contrôle du commerce illégal des espèces sauvages, et mécanismes régionaux tels que le South Asia Wildlife Enforcement Network, un réseau de coopération créé en 2008 et réunissant les huit pays de l’Asie du Sud.

Le Népal, l’Inde et la Chine ont conclu un accord formel de lutte contre la criminalité liée aux espèces sauvages. © WWF Nepal
Le Népal, l’Inde et la Chine ont conclu un accord formel de lutte contre la criminalité liée aux espèces sauvages. © WWF Nepal

Innovation
Le Népal a toujours cherché à apprendre de ses erreurs comme de ses bons coups, pour améliorer son intervention dans divers domaines. C’est ainsi que le pays est l’un des premiers qui ait adopté la technologie des engins aériens sans pilote pour mener plus efficacement des opérations anti-braconnage dans des zones protégées. Le Népal a également adopté les outils de surveillance des services et d’enregistrement des données (OSSED), un formidable outil de terrain utilisé pour surveiller et améliorer l’efficacité des opérations de gestion dans le domaine de la conservation. En outre, une équipe de chiens pisteurs sont déployés dans les parcs nationaux et patrouillent avec les gardiens et les militaires chargés des opérations de lutte contre le braconnage.

Un drone s’apprêtant à réaliser un vol d’essai dans le parc national de Bardia. © The Ginkgo Agency, Gary Van Wyk
Un drone s’apprêtant à réaliser un vol d’essai dans le parc national de Bardia. © The Ginkgo Agency, Gary Van Wyk

Champions
Des organismes comme le Fonds mondial pour la nature travaillent sur le terrain afin d’intéresser les jeunes Népalais à la protection de leur patrimoine naturel. Ainsi le WWF a pris les rênes de projets d’éducation en conservation tels les clubs écologiques. On compte aujourd’hui plus de 500 de ces clubs au pays, et 80 000 jeunes Népalais sont en voie de devenir des porte-étendards de la nature au sein de leur communauté. Le Népal a également su promouvoir la protection de la nature en faisant appel à des personnalités connues telles que Miss Népal et l’acteur de cinéma Rajesh Hamal.

Jeune membre du club écologique créé dans une école de village aux environs du parc national de Chitwan, Népal. © Simon de TREY-WHITE / WWF-UK
Jeune membre du club écologique créé dans une école de village aux environs du parc national de Chitwan, Népal. © Simon de TREY-WHITE / WWF-UK