La nature et l’économie ne sont pas ennemies

Les effets de notre négligence à l’égard de la nature pour assurer notre prospérité, aussi insoutenable qu’à courte vue, se font déjà sentir. Nous observons depuis quelques années une augmentation constante des températures moyennes de la planète en raison des dérèglements climatiques.

 © Global Warming Images / WWF
© Global Warming Images / WWF

Les inondations de Calgary, les tempêtes de verglas comme celle qui a frappé Toronto en décembre 2013 et la région montréalaise en 1998, entraînent des milliards de dollars de dégâts, sans compter toutes les vies humaines bousculées par ces phénomènes météorologiques extrêmes. Dans d’autres régions qui subissent encore plus sévèrement les effets des changements climatiques, comme l’Arctique canadien, l’ours polaire et d’autres espèces sauvages sont obligées de s’adapter au rétrécissement de la banquise. Les signaux d’alarme se multiplient : il faut agir d’urgence.
Et pourtant, malgré cette urgence, le Canada n’est pas en voie de remplir ses engagements de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) d’ici 2020. Dans ce contexte, la récente annonce, à l’effet que l’Ontario se joint au Québec et à la Californie dans ce qu’on appelle la « Bourse du carbone », est la bienvenue. Voici donc une quatrième province qui se dote d’un mécanisme de tarification du carbone, les deux autres étant l’Alberta et la Colombie-Britannique.
Il y a une chose qu’il faut savoir, et c’est une évidence : en nous souciant d’abord de la nature et de notre environnement, nous ne nuisons pas à l’économie. Comme en témoigne un rapport universitaire publié (en anglais seulement) par l’organisme La prospérité durable, l’expérience de la Colombie-Britannique, avec sa taxe sur le carbone, a permis de réduire de 19 % les émissions de GES de la province tout en maintenant son rendement économique au même niveau que le reste du Canada. De nombreux pays tournés vers l’avenir, partout dans le monde, voient les énergies propres comme des sources de prospérité, créatrices d’emplois grâce à l’innovation.
De notre point de vue, la meilleure nouvelle est que le leadership des provinces ouvre la voie, sur le plan économique, au soutien et à l’accélération de l’innovation au niveau des particuliers, des entreprises et des municipalités pour que chacun réduise notablement ses propres émissions.
Les villes, par exemple, ont jusqu’ici joué un rôle de premier plan dans la réduction des émissions de GES. Ces dernières années, Edmonton et Vancouver ont été honorées par le Fonds mondial pour la nature (WWF), dans le cadre du Défi des villes Une heure pour la Terre, pour leurs projets et leurs actions concrètes visant la réduction des émissions, allant de l’amélioration des transports collectifs à la création de partenariats novateurs en matière de réduction de la consommation d’énergie.
Bien des citoyens font ce qu’ils peuvent pour réduire leur empreinte carbone : ils utilisent les transports en commun, se servent d’énergies moins polluantes pour se chauffer, achètent ou louent des véhicules électriques, etc. Mais à plus grande échelle et à plus long terme, la tarification du carbone constituera une mesure économique incitative encore plus efficace pour que nous passions collectivement à l’action.
Du côté des entreprises, aussi, il y a des chefs de file. Dans le cadre du programme Climate Savers du WWF, 29 grandes sociétés mondiales ont réduit de 100 millions de tonnes les émissions de CO2 de leurs activités tout en faisant la preuve que ces choix pouvaient s’avérer profitable et créer des emplois. Au Canada, les villégiatures et hôtels Fairmont ont récemment affiché une réduction de 20 % de leurs émissions par rapport aux niveaux de 2006.
Chacune de ces initiatives mérite en soi d’être applaudie car elles sont autant de démonstrations de ce qu’il est possible de faire. Mais si nous voulons renverser la vapeur à la vitesse et à l’échelle nécessaires pour ralentir les changements climatiques, il faut que nos systèmes économiques intègrent un coût pour la pollution carbonique. Nous devons tous, collectivement, reconnaître l’importance de donner la priorité à la nature.