Vers des océans en santé pour la Journée mondiale des océans 2015

Bien que nous n’ayons que rarement la chance de le constater à partir de la terre ferme, les océans sont des endroits grouillants de vie et d’activité. Que ce soit à la surface ou en profondeur, il se passe beaucoup de choses dans nos océans, et ce, chaque jour : des baleines qui migrent sur de très longues distances aux coraux qui se développent lentement, en passant par les explosions sous-marines typiques des tests sismiques liés à l’exploration pétrolière et gazière.

 Lançons d'Amérique (Ammodytes americanus) dans les eaux de l'Atlantique, baie St. Margarets, Nouvelle-Écosse, Canada
Lançons d’Amérique (Ammodytes americanus) dans les eaux de l’Atlantique, baie St. Margarets, Nouvelle-Écosse, Canada

De plus, nous remarquons malheureusement peu les services essentiels que les océans nous fournissent. Nos vies – l’air que nous respirons, la stabilité du climat – dépendent des océans. Notre économie et nos communautés sont aussi intimement liées à la santé de ces écosystèmes si riches.
Il est aussi facile d’oublier que le Canada fût bâti sur les océans. En particulier, il a été bâti sur la nourriture que nous en tirons. C’est pourquoi nous avons récemment travaillé en collaboration avec le syndicat FFAW-Unifor afin de créer un nouveau projet d’amélioration des pêcheries. Ce projet vise à ramener la pêche à la morue du Nord, à Terre-Neuve-et-Labrador, sur le chemin de la durabilité et de la viabilité. Cette pêcherie emblématique est soumise à un moratoire depuis 1992.
Aujourd’hui le 8 juin, alors que nous soulignons la Journée mondiale des océans, nous constatons que 2015 est déjà une année charnière pour les océans canadiens. En avril, TransCanada a officiellement abandonné son projet de terminal pétrolier à Cacouna, au Québec – un habitat essentiel à la survie des bélugas du Saint-Laurent. Nous avons également constaté les débuts d’un important effort de protection et de planification marines sur la côte Ouest, avec l’approbation de partenariats de planification marine de pointe qui contribueront à garantir un avenir en santé pour plus de 102 000 km2 de la zone marine du Grand Ours, en Colombie-Britannique.

Par contre, derrière ces petites victoires, se cache une vérité qui dérange : seulement une petite fraction du territoire marin du Canada est protégé par la loi. En fait, seulement 1 % des océans canadiens sont dotés d’une telle protection, ce qui est très loin de notre engagement envers la Convention des Nations Unies sur la diversité biologique, soit de protéger 10 % du territoire d’ici 2020.
C’est pourquoi le WWF-Canada et cinq partenaires de conservation bien connus ont déposé une liste de recommandations (en anglais seulement) aux députés fédéraux concernant la santé des océans. En particulier, il est absolument essentiel d’accroître le degré de protection marine au Canada, au bénéfice d’océans prospères, mais aussi des multiples communautés qui en dépendent.
June 3rd letter to PM

En collaboration avec la Société pour la nature et les parcs (SNAP), la Fondation David-Suzuki, le Ecology Action Center, Greenpeace et Living Oceans, nous affirmons que le Canada doit en faire beaucoup plus pour garantir le futur de nos océans, et l’un des gestes les plus urgents à poser est de créer davantage de zones de protection marine de qualité – et de le faire beaucoup, beaucoup plus vite.
Les zones de protection marine (ZPM) sont reconnues comme étant un moyen important de protéger la santé des océans. Bien qu’il y ait plusieurs définitions possibles de ce qu’est une ZPM, l’essentiel est le suivant : un endroit où les activités humaines sont restreintes ou encadrées de quelconque façon.
La désignation de telles zones est reconnue comme contribuant à l’amélioration de la santé, de l’intégrité et de la productivité des écosystèmes marins, et peut également ralentir la perte de biodiversité et soutenir la conservation de secteurs écologiquement importants.
Un nouveau rapport du WWF (en anglais) souligne que la protection d’habitats marins essentiels, tels que les océans, peut générer des bénéfices nets de l’ordre de 490 à 920 milliards de dollars d’ici 2050. Mais qu’en est-il de la valeur économique des ZPM au Canada? En plus des services écologiques, les ZPM qui protègent des habitats et des espèces clés peuvent stimuler certaines activités économiques telles que l’observation des baleines ou la plongée avec les requins, qui rapporteraient des milliards.
Uniquement sur la base de ces deux exemples, il est clair que la protection de nos océans constitue un investissement qui en vaut la peine. Bien que les ZPM continuent de croître en popularité, nous avons encore besoin d’une couverture de haute qualité dans plusieurs régions. Le WWF-Canada a déjà souligné ses préoccupations (en anglais) en lien avec la faible qualité de la ZPM du chenal Laurentien, proposée près des côtes de Terre-Neuve, qui sera ouverte à 100 % à l’exploration et à l’exploitation pétrolière et gazière malgré cette « protection » fédérale.
Parmi cette performance plutôt morose, Le Gully – la première ZPM dans l’Atlantique canadien – constitue le joyau de notre protection des océans. Les efforts de conservation dans la région ont débuté vers la fin des années 1980, mais c’est uniquement en 2004 que ce canyon sous-marin d’une grande richesse est officiellement devenu une zone protégée. La population de baleines à bec communes – une espèce en danger – résidentes de la région du Gully a contribué à faire avancer ce projet. Ces baleines vivent exclusivement dans ce canyon et dans quelques autres tout près.

Baleine à bec commune (Hyperoodon ampullatus), île de Sable, océan Atlantique, au large de la Nouvelle-Écosse, Canada. © Robyn BAIRD / WWF-Canada
Baleine à bec commune (Hyperoodon ampullatus), île de Sable, océan Atlantique, au large de la Nouvelle-Écosse, Canada. © Robyn BAIRD / WWF-Canada

Toutefois, même une histoire à succès telle que celle du Gully a ses limites. Cette ZPM a été utile pour protéger un territoire géologique unique et pour créer un refuge pour la population en danger de baleines à bec communes. Mais tracer une boîte autour d’un secteur ne permet pas de protéger ce dernier contre toutes les menaces. La pollution sonore des tests sismiques liée à l’exploration pétrolière et gazière, par exemple, ne connaît pas de frontières.
Les ZPM : en avons-nous besoin? Oui. Devrions-nous en avoir plus? Oui. Il y a un long chemin à parcourir, mais c’est un chemin qui en vaut la peine.
Que pouvez-vous faire? Vous pouvez écrire à votre député(e) et lui dire que, vous aussi, pensez que les océans ont besoin de protection. Vous pouvez aussi faire un don au WWF et ainsi appuyer l’important travail que nous faisons.