Climat : un moment charnière

Le 18 juin dernier, le programme de mobilisation dans les milieux de travail du WWF-Canada, Planète vivante au travail (Living Planet @ Work), a organisé une soirée de fête pour souligner la fin de la campagne de financement Spring Things. Les participants ont eu droit à une allocution, suivie d’une période de questions, avec l’honorable John Godfrey, conseiller en changements climatiques pour le gouvernement de l’Ontario. M. Godfrey a offert au public présent une interprétation historique des changements climatiques. Voici un résumé de ses remarques.
Nous sommes aujourd’hui à un moment charnière de notre histoire.
L’enjeu des changements climatiques, ainsi que nos choix technologiques qui y sont associés, n’est plus radical. Il s’agit désormais d’une question à laquelle les gouvernements, et plus récemment le pape, réfléchissent et pour laquelle ils recherchent des solutions. Nos attitudes, nos gestes et notre savoir évoluent rapidement. En tant qu’historien, j’aimerais partager ma perspective sur la prochaine révolution industrielle qui est à nos portes, et sur la manière dont nous avançons vers un avenir à faible teneur en carbone.

John Godfrey © Charlie Lindsay / WWF-Canada
John Godfrey © Charlie Lindsay / WWF-Canada

The Unbound Prometheus (L’Europe technicienne ou le Prométhée libéré) est un classique de l’histoire économique, qui s’articule autour de trois grandes révolutions industrielles et qui analyse l’amorce et les résultats de chaque d’entre elles. Pendant ces révolutions, comme nous le constatons aujourd’hui, la société a changé à un rythme incroyable, grâce à l’introduction de nouvelles technologies.
La première industrialisation a modifié la manière dont nous travaillions, puis l’électricité et le moteur à explosion ont changé la façon dont nous nous déplacions et voyagions, et enfin la chimie et l’électronique a modifié comment nous voyions le monde et comment nous l’abordions. Aujourd’hui, alors que la révolution à basse teneur en carbone va bon train, nous constatons comment certaines technologies – comme les véhicules électriques Tesla, par exemple – nous permettront de conserver certaines parties de notre mode de vie tout en continuant le virage des combustibles fossiles vers l’énergie propre, et comment d’autres technologies – comme le courriel ou les télé-conférences – élimineront le besoin de faire certains choix plus polluants, comme les voyages ou l’envoi de courrier traditionnel.
Dans Le Prométhée libéré, David Landes affirme : « Aucun système économique ou social, du moins d’un point de vue historique, n’a déjà été poussé à son extrémité logique et aux conséquences de cette dernière. » Aujourd’hui, je crois que nous avons atteint ce point. Et la principale conséquence de cette extrémité, ce sont les changements climatiques. L’heure est venue d’utiliser l’innovation, ainsi que les politiques publiques, pour appuyer la révolution numérique et faire naître une société à basse teneur en carbone.
À cet effet, il y a trois choses que nous devons faire.
La première, c’est de s’adapter. Malheureusement, les conséquences des changements climatiques se font déjà sentir. Nous sommes en retard. Par exemple, à Winnipeg, les infrastructures ont été conçues pour résister à des crues à récurrence de 100 ans. Tout à coup, à partir des années 1990, nous avons constaté que les inondations de fort calibre se produisaient de plus en plus souvent – trois crues d’une telle ampleur en l’espace de 10 ans. Nous devons nous adapter à un futur changeant, mais cette adaptation se heurte à notre incapacité de se projeter dans l’avenir en fonction des leçons que l’histoire nous enseigne. Nous ne pouvons plus simplement se baser sur le passé pour penser le futur; nous devons plutôt bâtir et s’adapter en fonction des changements que nous pouvoir prévoir.
Évidemment, nous devons être capables de marcher et de mâcher de la gomme en même temps. Dans le cas qui nous occupe, cela signifie que nous devons à la fois prévoir des mesures de mitigation – réduire nos émissions de gaz à effet de serre – tout en planifiant notre adaptation à plus long terme. C’est ici que le programme de plafonnement et d’échange des droits d’émission de GES, en Ontario et au Québec, entre en jeu. Ce programme ne constitue pas une solution magique. Au mieux, il créera 20 % de la solution. Le plus important, c’est le signal envoyé aux entreprises : mettre un prix sur le carbone signifie que la transition vers une économie à faible teneur en carbone est en cours. De plus, cette politique en soutient d’autres ayant aussi pour objectif la réduction des émissions de GES à travers divers secteurs de l’économie.
Enfin, nous devons investir dans l’innovation. Voilà d’où nous pouvons tirer notre espoir pour l’avenir. Notre propre ingéniosité peut jouer un rôle important dans le virage et la nouvelle direction que nous devons prendre, elle peut nous donner le momentum pour y arriver.
Les changements climatiques auront un impact dévastateur sur plusieurs espèces à risque. Ils frapperont durement notre économie. Et toute la société devra s’adapter à un nouveau climat. Ses conséquences heurteront davantage les personnes et les communautés les moins bien placées pour s’adapter. Pensez seulement aux communautés autochtones et à comment elles pourront s’adapter aux inondations de plus en plus nombreuses. Les changements climatiques constituent évidemment un enjeu environnemental, mais aussi économique et – peut-être de manière encore plus importante – une question de justice sociale.
Sur cet enjeu, nous avons le devoir d’agir et d’espérer un avenir meilleur. Pour illustrer cela, je ne pourrais mieux dire que le pape lui-même : « Et pourtant, tout n’est pas perdu. Les êtres humains, bien qu’ils soient capables du pire, sont également capables de se hisser au-dessus d’eux-mêmes, et de choisir ce qui est bon, et de prendre un nouveau départ. »
Ces remarques constituent le résumé de l’allocution de l’honorable John Godfrey, intitulée « A Historian’s Perspective on Climate Change » – Le point de vue d’un historien sur les changements climatiques. M. Godfrey était l’invité d’honneur de la fête organisée par le WWF-Canada pour souligner la fin de la campagne de financement de son programme de mobilisation en milieu de travail, Planète vivante au travail (Living Planet at Work). Cette campagne, Spring Things, a été couronnée de succès cette année. Apprenez-en davantage sur les dons corporatifs et la mobilisation au travail ici.