Qui a dit qu’on ne peut rien faire d’utile avec un kayak?

Monique Dubé
Chaire de recherche du Canada, université de la Saskatchewan
C’est peut-être l’ampleur du problème même qui m’a stimulée et je n’ai pas pu résister au défi. Ou alors le fait qu’à l’échelle mondiale, les femmes et leurs filles sont désavantagées par l’eau en raison du rôle qui leur est réservé d’aller puiser l’eau nécessaire à la survie de la famille et de la communauté. Pas facile de s’instruire quand il faut marcher des kilomètres tous les jours pour aller chercher l’eau; pas facile d’éviter les maladies lorsqu’on est en contact direct avec des sources d’eau contaminées. Ou alors c’est le sentiment qui m’envahit d’avoir un rôle à jouer lorsque je survole la rivière Nahanni, que je pagaie le long de la rivière Saskatchewan Sud, que je recueille des échantillons d’eau et de poissons dans la rivière St-Jean, ou survole la rivière Athabasca et les sables bitumineux de l’Alberta. Peu importe la raison, ma mission c’est l’eau!

Monique Dubé (c) Todd Pugsley
On dira ce qu’on voudra, l’expérience est le meilleur – et parfois le seul – moyen de vraiment bien comprendre les choses. Je ne pourrais dire combien d’heures j’ai passées dans des salles de classe à apprendre, écouter et enseigner, ni le nombre de livres et d’articles scientifiques que j’ai lus dans ma vie. L’instruction est un cadeau et une nécessité, ça ne fait aucun doute. Néanmoins, j’ai eu le sentiment de commencer à apprendre vraiment lorsque je suis allée à l’eau avec mes étudiants, lorsque j’ai vu des fillettes de l’âge de la mienne parcourir une longue route avec un bidon de 20 litres d’eau sur la tête, lorsque j’ai écouté les aînés parler de l’eau. C’est dans mon kayak que j’ai appris davantage sur la vie, le rôle et les besoins d’une rivière et des gens qui en dépendent.
Ces connaissances m’ont menée à ma plus récente aventure : 1600 km en kayak sur la rivière Yukon pour appuyer Femmes canadiennes pour les femmes en Afghanistan!
Le 18 juillet, je m’embarque pour une course en kayak de 1600 km, de Whitehorse au Yukon à la traversée de la rivière Dalton en Alaska. C’est la plus longue course dans le monde, et peu de femmes y participent. Je serai la première personne à participer en solo et sans soutien (bateau de sauvetage). J’ai bien l’intention de pagayer 18 heures par jour pendant de 7 à 8 jours. Suivez mon périple (nom de l’équipe : If at First…).
Pourquoi? Pour l’amour de la rivière Yukon, que je croyais vierge dans le Nord canadien, ce qui n’est pas le cas. Pour me rappeler les limites imposées aux femmes et le combat sans fin qu’il faut mener pour défendre leurs droits. Pour recueillir des fonds en vue de créer des programmes d’accès à l’éducation pour les femmes afghanes par l’intermédiaire de Femmes canadiennes pour les femmes en Afghanistan. En Afghanistan, 22,1 millions de personnes vivent dans la pauvreté et dans des conditions inférieures au niveau normal, 309 000 enfants de moins de cinq ans y meurent chaque année, l’instruction est interdite aux filles sur 90 % du territoire, et seule une proportion de 17 % de la population a accès à de l’eau potable, et 10 % à des mesures d’assainissement adéquates.
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