Le coût de l’inaction en matière de réchauffement climatique

On parle souvent de l’effet du réchauffement climatique sur la planète – la banquise qui fond en Arctique, les espèces menacées d’extinction, l’intensité croissante des catastrophes naturelles. Tout cela exerce une pression considérable sur notre environnement, et cela finit par toucher les populations humaines. Au Canada, on risque de ne pas tarder à voir grimper la note des coûts essentiels.
Est-ce inévitable? Certainement pas. J’ai été invitée hier soir au bulletin de nouvelles de la chaîne CTV pour répondre à cette question précise, et pour souligner que le réchauffement climatique n’est pas une fatalité inéluctable et que l’on y peut quelque chose. L’analyse du WWF au sujet du réchauffement climatique veut qu’une transition réalisée à l’échelle mondiale en faveur de la conservation, de l’efficacité et des énergies renouvelables nous permettrait, en fait, d’économiser quelque 5,5 billions de dollars par année d’ici 2050.

Chris Turner, auteur de l’ouvrage The Leap et Zoe Caron, invités de la chaîne CTV (C) Zoe Caron/ WWF-Canada
Si l’on ne fait rien, il faudra assumer les frais des incidences sur la santé du réchauffement climatique. Le secteur agricole a déjà commencé à en faire les frais dans le sud du pays, et ce n’est qu’un début. En agissant, par contre, nous pourrons éviter cela. Et personne dans le monde n’est mieux placé pour faire face au réchauffement climatique. En effet, le Canada regorge de ressources naturelles, de sources d’énergies renouvelables, le pays bénéficie d’une économie stable et ses citoyens sont sensibilisés aux questions environnementales. Ne sommes-nous pas bien placés pour prendre les devants et mener la guerre aux changements climatiques?
LA grande question, bien sûr, est de savoir combien il en coûtera de faire face au réchauffement climatique et d’éviter de faire peser ces coûts sur notre économie. Selon l’estimation d’un ancien économiste en chef de la Banque mondiale, la part du PIB que l’on affectera à la lutte au réchauffement climatique serait de l’ordre de 2 % à l’échelle mondiale, tandis que le coût de l’inaction s’établira dans une fourchette de 5 % à 20 % du PIB. Le rapport publié hier présente une estimation plus prudente de 1 % du PIB d’ici 2050, mais de l’avis même des auteurs, cela risque fort de se révéler trop faible.
Alors qu’attendons-nous? Et où investissons-nous? Les fonds doivent être affectés dans divers domaines, et en grande partie dans des programmes qui créeront de l’efficacité et de la conservation d’énergie. Un de mes collègues a résumé la chose ainsi l’autre jour : « si seulement nous pensions à l’efficacité et à la conservation comme une source d’énergie, nous serions assis sur une mine d’or ». Chaque quantité d’énergie non dépensée est de l’énergie gagnée. En plus, on crée davantage d’emploi en investissant dans l’efficacité et la conservation que dans l’énergie renouvelable.
À ce propos, l’énergie renouvelable est une autre importante pièce du casse-tête et nous devons investir dans ce domaine. Les gouvernements offrent des programmes incitatifs et des subventions pour le charbon, le pétrole et le gaz ainsi que l’énergie nucléaire, mais il n’existe pratiquement rien pour aider les entreprises d’énergie solaire, éolienne, marémotrice, géothermique ou les petites centrales hydroélectriques à percer le marché. Les « coûts » de tels programmes sont souvent considérés comme un simple transfert de dépense. Alors pourquoi les 1,4 milliard de dollars versés aux secteurs du pétrole, du gaz et du charbon, ne vont pas aux énergies renouvelables aussi? Voilà quelques questions qu’il faut bien poser, et se poser.
Heureusement, on sait que la moitié de la population canadienne estime qu’il est important et urgent d’agir en matière de changements climatiques, et que la vaste majorité de la population préfère les énergies renouvelables au charbon, au pétrole et au gaz. Il s’agit donc de réorienter notre économie, d’affecter nos ressources autrement, et d’agir à bon rythme pour éviter que ne croissent davantage les coûts de l’inaction.
En fin de compte, nous n’avons pas vraiment le choix. Le réchauffement climatique est déjà engagé, et il y a bien plus en jeu que des chiffres dans une colonne.
Vous pouvez consulter le rapport Paying the Price à l’adresse www.nrtee-trnee.ca.