Ruée hâtive vers le pétrole de l’Arctique

Ces dernières semaines, le gouvernement fédéral a mis aux enchères 905 000 hectares de l’océan Arctique canadien pour permettre aux entreprises du secteur énergétique d’acquérir des droits d’exploration sur une superficie équivalant à la moitié du lac Ontario, rapportaient récemment La Presse et la SRC.

Plateforme de forage reliée à la terre ferme par un pont dans la mer de Beaufort, au large de l’Alaska (États-Unis). © National Geographic Stock/ James P. Blair / WWF
J’ai vu cette manchette dans le Globe and Mail le lendemain de mon exposé sur le développement des ressources pétrolières et gazières au large des côtes de l’Arctique, prononcé devant le Comité permanent des Ressources naturelles de la Chambre des communes. L’essentiel de mon message soulignait l’importance d’un développement prudent, durable dans l’Arctique, fondé sur de solides connaissances scientifiques et une planification réfléchie.
J’y faisais notamment remarquer que :
« Le WWF reconnaît et soutient la nécessité d’un développement économique soigneusement planifié dans l’Arctique, surtout d’un développement qui profite à long terme et de façon durable aux gens du Grand Nord. Nous sommes aussi conscients du fait que le développement de l’Arctique est envisagé dans une perspective de croissance nationale prévoyant 500 nouveaux projets au cours de la prochaine décennie, projets qui entraîneront des nouveaux investissements de 500 milliards $. Il est donc temps que notre gouvernement démontre de façon convaincante aux Canadiens qu’il existe bel et bien un code de politiques réglementaires à la hauteur de la tâche de planification, d’évaluation et de mise en œuvre de ces projets de manière à protéger les valeurs environnementales et culturelles essentielles tout en diminuant les risques de conflits avec d’autres objectifs sociaux, économiques et environnementaux. »
Le regain d’intérêt de l’industrie pour l’exploration au large des côtes de l’Arctique est aussi étonnant qu’il semble prématuré, étant donné que l’industrie n’a pas encore fait la preuve qu’elle peut forer sans danger dans les conditions extrêmes de l’Arctique. En l’absence d’alternative éprouvée au « puits de secours en même saison », la logique économique du forage en mer est douteuse, même dans les meilleures conditions, d’autant plus qu’en cas de déversement, il n’existe aucune mesure d’intervention efficace dans les eaux couvertes de glace de l’Arctique.
Ce n’est pas le temps de se lancer dans des aventures d’exploitation pétrolière à haut risque. C’est plutôt le temps de mieux comprendre comment l’écosystème de la mer de Beaufort se transforme en raison des changements climatiques et de planifier l’intendance à long terme des ressources de l’Arctique au profit des collectivités et de l’environnement.