C’est mauvais, c’est laid, où est le bien?

Vous avez peut-être vu ou entendu parler de cet article paru récemment dans le Globe and Mail (en anglais), qui soulignait un défaut évident du plan d’intervention proposé en cas de déversement d’hydrocarbures autour du projet d’oléoduc et de transport pétrolier Northern Gateway dans la région du Grand Ours, en Colombie-Britannique. Le promoteur du projet, Enbridge Northern Gateway, s’appuie en grande partie sur l’hypothèse que la matière qu’il envisage transporter à travers la région du Grand Ours – du bitume dilué – se comporte à peu près de la même manière que du pétrole classique quand il se répand.
Si c’était vrai, ce serait mauvais. Malheureusement, c’est pire encore.
Quand il est question de nettoyer un déversement d’hydrocarbures dans l’environnement marin, le bien n’existe pas. Au mieux, le nettoyage d’un déversement de pétrole classique se traduit par un dégât désastreux. Comme l’a fait remarquer Robert Powell dans un récent blogue, notre capacité de nettoyer du pétrole dans l’océan est sérieusement limitée.
La plupart des estimations les plus fiables établissent à 15 % la proportion de pétrole déversé qui peut être récupérée, et ce, dans les meilleures conditions : par mer calme, quand on trouve sur place du matériel d’intervention d’urgence en quantité suffisante.
Mais ça, c’est pour un déversement de pétrole classique. Le bitume dilué, une fois répandu, se sépare en bitume et en diluant, des agents de dilution toxiques tirés du gaz naturel qui s’évaporent, rendant tout travail à proximité extrêmement difficile et dangereux. Le bitume est plus lourd que le pétrole brut : quand il se déverse, il devient progressivement plus dense en raison d’un processus appelé « atmosphérisation ». À terme, il peut couler ou être aspiré par la colonne d’eau, voyager dans les profondeurs au gré des courants de marée, être brassé avec les sédiments et organismes marins, refaire surface ailleurs ou se déposer au fond de l’eau.
Dans le chenal marin de Douglas, qui est alimenté par d’innombrables sources d’eau douce et de sédiments et qui baigne tout un réseau d’estuaires et de baies ainsi que plus de mille kilomètres carrés d’îles et d’îlots, l’amplitude des marées atteint près de huit mètres.

L’adjectif laid ne suffit pas à qualifier ce que ferait un déversement de bitume dilué dans ces eaux.
Bien sûr, nous devrions nous inquiéter du fait que le promoteur du projet a faussement présenté le comportement du bitume dilué. Mais avant tout, il faut se demander comment il se fait qu’un tel projet, avec tous les risques qu’il comporte, soit même envisagé dans une région aussi remarquable.
Le pays du Grand Ours possède un écosystème en santé, et même florissant. Son économie diversifiée se développe de manière de plus en plus durable. Les collectivités qui l’habitent sont passionnément vouées à la préservation de ces acquis.

(C) Gerald Butts, WWF-Canada

Ça, c’est le bien.

Aujourd’hui, à l’instant même, nous avons plus que jamais besoin de votre voix.
Même si l’échéance du 31 août est passée pour vous faire entendre auprès de la Commission d’examen conjoint du projet Northern Gateway, il n’est pas trop tard pour transmettre vos commentaires aux instances gouvernementales qui auront à décider de l’avenir de ce projet :