Protection des requins par la CITES – de la théorie à la pratique

Nous avons accueilli avec plaisir plus tôt cette année la décision historique adoptée par les Parties présentes à la réunion de la CITES (CoP16) (Convention sur le commerce international des espèces menacées d’extinction) de réglementer le commerce international de cinq espèces de requins et de mantes géantes. Le Fonds mondial pour la nature avait bien sûr applaudi l’engagement des gouvernements des quatre coins du globe à veiller à la conservation de la biodiversité marine et à la santé de nos océans. Une étude récente réalisée par TRAFFIC se penche également sur la manière de mettre en application le contrôle du commerce découlant de la réglementation de la CITES, afin que les nouvelles espèces de requins et de mantes géantes qui feront l’objet de commerce international proviennent de sources responsables.

Aileron d'un grand requin marteau, nord des BahamasRequin-marteau tiburo (Sphyrna mokarran), nord des Bahamas
Brian J. Skerry / National Geopgrahic Stock/WWF

Quelques mois ont passé et nous avons demandé à Ernie Cooper, notre directeur, TRAFFIC et commerce des espèces sauvages, comment le Fonds mondial pour la nature contribue à ce que cette décision de la CITES soit appliquée.
Expliquez-nous ce que signifie l’inscription de ces requins et mantes sur la liste de la CITES?
Ce sont cinq espèces de requins et les deux espèces de mantes qui ont été ajoutées à l’Annexe II de la CITES, ce qui signifie que les 178 pays membres de la Convention doivent maintenant amender leur réglementation nationale afin de rendre illégales l’importation et l’exportation de toute partie de ces espèces en l’absence d’un permis de la CITES. Sur le plan de la conservation des espèces, c’est un grand pas qui vient d’être fait, après quasiment une décennie de travail. Mais il ne faut pas oublier que pour le moment, ça ne demeure qu’une liste et des mots sur papier, et qu’il faut maintenant passer à l’étape de la mise en application, sans quoi nous n’aurons rien accompli. Chaque pays – le Canada y compris – dispose de 18 mois pour modifier sa réglementation et mettre la structure en place pour faire respecter la loi avant que l’interdiction de la CITES n’entre en vigueur.
Comment fait-on pour veiller à ce que l’entrée en vigueur de la réglementation se fasse bel et bien?
Ici au Canada, nous travaillons en étroite collaboration avec les autorités canadiennes concernées, le groupe d’experts en requins de l’UICN et nos bureaux du WWF et de TRAFFIC à travers le monde. Autrement dit, un pays exportateur de produits des espèces visées par la réglementation doit faire la démonstration que le commerce qu’il fait de ces espèces est légal et ne constitue pas une menace à la conservation des espèces. S’il n’y arrive pas, on ne lui délivrera pas de permis.
La première étape consiste donc à déterminer si la pêche des espèces visées se fait de manière responsable ou non, au moyen de ce que l’on appelle des avis de commerce non préjudiciables. Cette approche est délicate en ce qui touche aux espèces marines, et aux requins en particulier, car ce sont des animaux migrateurs et il est difficile de dénombrer leurs populations et d’en assurer le suivi par la suite. De nombreuses espèces de requins traversent les eaux de plusieurs pays dans le courant d’une même année, ce qui rend l’exercice assez compliqué. Et n’oublions pas que de nombreux pays ont une longue tradition de pratiques de pêche non responsables.
Ensuite, il faut veiller à l’application de la réglementation. Pour ce faire, les pays doivent amender leur législation pour faire du commerce international de ces espèces sans permis une violation de leurs lois nationales. Au Canada, il faudra amender le Règlement sur le commerce des espèces animales et végétales sauvages, soumettre le projet d’amendement à une consultation publique, et publier l’amendement adopté.
L’application de la réglementation revient aux agents chargés de l’inspection des chargements dans les pays importateurs et exportateurs. Je vous assure que leur boulot est loin d’être simple. Ils doivent par exemple être capables d’identifier un aileron de requin séché et déterminer de quelle espèce il provient. Ils doivent également vérifier que la quantité d’un produit, les espèces et les permis, que tout cela concorde.
Et le Fonds mondial pour la nature dans tout ça?
Au WWF-Canada, ce projet est en tête de liste de nos priorités des trois prochaines années. Il y a un moment déjà que je travaille avec mes collègues du WWF un peu partout dans le monde, ainsi qu’avec l’UICN et d’autres groupes de conservation, afin de mettre au point les ressources et cerner les lacunes d’information à combler en ce qui touche à l’application et à l’identification, deux pièces cruciales de cet immense casse-tête.
Je travaille depuis un moment à déterminer quelles ressources sont disponibles en matière d’identification, afin d’aider les agents chargés de l’application de la réglementation à bien identifier les différents types d’ailerons de requins, et à définir ce qui doit être développé comme ressource en ce sens. Ainsi je suis en contact avec des étudiants au doctorat en Australie, dont les travaux très intéressants sur la morphologie et l’ADN pourraient nous être utiles. Je suis également en communication régulière avec les gens du ministère des Pêches et Océans et d’Environnement Canada. Tout cela est très stimulant, et ce n’est qu’un exemple parmi d’autres de ce que représente le travail en conservation.
L’action du WWF-Canada en matière de conservation – comme le travail d’Ernie Cooper pour les requins et les mantes géantes – est soutenue par des fonds  découlant notamment du Programme de carte BMO® WWF-Canada. Demandez la carte BMO WWF-Canada AIR MILES®† MasterCard®* avant le 31 août prochain et obtenez 500 AIR MILES de plus sur tout achat de 200 $ et plus effectué d’ici le 31 octobre 2013. Vous avez déjà la carte? Alors nous vous remercions de soutenir le travail du Fonds mondial pour la nature, ici et ailleurs dans le monde.