Les changements climatiques… dans ma cour?

Écrit par Amy Huva, blogueuse invitée

On voit tant de nouvelles de catastrophes frappant des pays éloignés qu’il est facile de penser que les changements climatiques, c’est pour les autres et ça ne doit pas nous inquiéter. Ce n’est pas complètement faux, mais pas entièrement vrai non plus. Le fait est que les bouleversements climatiques nous menacent tous, et il n’y a pas de « pas dans ma cour » qui tienne.
Pensons par exemple à la hausse du niveau de la mer, qui est un phénomène mondial. Or, pour ne parler que de l’Amérique du Nord, il n’y a pas que La Nouvelle-Orléans qui disparaîtra sous l’eau, mais plus près de chez nous encore, la région des Hamptons, zone de villégiature très huppée de l’État de New York, sera submergée elle aussi. La menace est bien réelle, et elle nous vise tous.
Carte du niveau de la merLes Hamptons – on voit la zone qui sera submergée dès que la hausse du niveau de la mer aura atteint 9 cm (carte de NOAA Geoplatform)
Cela soulève une importante question sur laquelle de nombreux gouvernements devront se pencher au cours des prochaines années : si nous savons que le niveau de la mer monte et nous savons à quel rythme la mer progresse (actuellement 3mm/année), à partir de quel niveau une maison bâtie en plaine inondable ou en bord de mer devient-elle trop chère à réassurer?
Ah!, les assurances résidentielles… vous ne m’aviez pas vue venir avec celle-là, hein? Ça commence à se rapprocher de notre cour?
De nombreux Albertains sont aux prises avec cette question épineuse à la suite des inondations qui ont frappé durement plusieurs régions de cette province cet été. En effet, le gouvernement provincial a annoncé qu’il dénouerait les cordons de sa bourse pour aider la population cette fois-ci, mais ceux qui rebâtiront en zone inondable doivent savoir qu’ils ne recevront aucune aide la prochaine fois.
Voilà qui est logique, en un sens, bien que cela suppose des décisions très difficiles. De fait, le réchauffement climatique ne faisait pas partie de la donne lorsque nos villes ont été bâties, et nous ne faisons que commencer à tenir compte des changements climatiques dans nos projections et nos processus décisionnels.
Et nous serons de plus en plus contraints de tenir compte de cette dimension à mesure que fondra la calotte glaciaire. Je devrai par exemple me demander à quelle hauteur se situe ma maison par rapport au niveau de la mer, est-ce que j’habite en zone inondable, si le niveau de la rivière monte, suis-je sur la pente qui sera balayée par les eaux? Dans l’affirmative, je devrai décider si je dois partir, si je peux partir et, surtout, pour aller où? Les réfugiés climatiques ne viendront pas tous des îles du Pacifique qui auront été submergées. Il y aura aussi des gens de Richmond et Abbotsford quittant la plaine inondable du fleuve Fraser, des habitants du sud-ouest des États-Unis de plus en aride et chaud prenant la direction du nord, en Oregon ou à Vancouver, où il y a encore de la pluie, donc de l’eau. Et que dire des zones riveraines habitées un peu partout au Québec, dont certaines ont déjà goûté aux débordements des rivières?
Voilà pour le côté sombre. Nous avons créé cette situation et nous devons apprendre à vivre avec. En revanche, comme nous savons qu’elle existe, nous devrions pouvoir agir et prévenir. Et la plupart d’entre nous ont les moyens d’agir.
Individuellement, nous pouvons nous renseigner sur les prévisions entourant le lieu que nous habitons et commencer à réfléchir à ce que nous voulons faire. Surtout, nous avons la possibilité d’y réfléchir avant l’inondation, l’ouragan ou la tempête qui nous forcera à agir dans l’urgence et à décider, mais un peu tard.
Sur le plan politique, nous pouvons demander à nos élus – ils sont censés travailler pour nous, après tout – de faire preuve de leadership et de penser à plus long terme que la prochaine élection. Il ne serait pas difficile pour nos gouvernements d’adopter des mesures telles que l’interdiction de construire en zones inondables, ou alors uniquement en présence de protection contre les inondations, et de ne pas autoriser la construction de nouvelles infrastructures à long terme à moins d’un mètre au-dessus du niveau de la mer.
Mieux encore, nous pouvons tous faire notre part pour minimiser les impacts de la hausse du niveau de la mer en réduisant nos émissions de GES. Plus vite nous cesserons de produire des émissions de carbone, moins le niveau des mers augmentera sous l’effet du réchauffement climatique issu des GES. Voilà ce que veulent dire les scientifiques lorsqu’ils parlent de s’adapter à ce qu’on ne peut éviter et éviter ce à quoi on ne peut s’adapter.
En tout cas, une chose est sûre – le réchauffement climatique nous vise et nous touchera tous, riches et pauvres, et où que nous vivions.