Semaine de l’ours polaire : Les ours polaires de l’espace

Par Seth Stapleton, Department of Fisheries, Wildlife and Conservation Biology, University of Minnesota, et Michelle LaRue, Conservation Biology Graduate Program, University of Minnesota
Un des plus grands défis qui se posent à la recherche sur les ours polaires est l’immensité et l’éloignement des lieux qu’ils habitent. L’Arctique est presque quatre fois plus grand que les États-Unis. C’est aussi une région difficile d’accès, au climat inhospitalier. La collecte de données sur le nombre d’ours vivant dans une zone déterminée et leur répartition sur le territoire est essentielle aux efforts de conservation, mais c’est aussi un processus très long, dangereux et coûteux. Et il arrive parfois que cette recherche s’avère impossible dans des zones carrément inaccessibles.

Singleton-Resized-600x400Ours sur l’île Rowley, bassin Foxe, Nunavut © Seth Stapleton

Un programme de recherche sur les ours polaires se fait habituellement à l’aide d’hélicoptères à bord desquels l’on survole d’immenses étendues de banquise et de terres émergées pour les retrouver. Certaines études recueillent surtout des données sur les endroits que fréquentent les ours, tandis que d’autres nécessitent leur capture : on endort les ours à l’aide de fléchettes tranquillisantes pour leur poser un marqueur qui permettra de les identifier à l’avenir; on effectue aussi des mesures et des prélèvements d’échantillons pour connaître leur âge, leur état de santé et leur alimentation, entre autres. Ces études approfondies fournissent des renseignements détaillés et précieux, mais elles exigent souvent des années de travail ardu et peuvent coûter des centaines de milliers de dollars, en plus de perturber les animaux capturés. Et elles ne peuvent se faire partout.
Pour mieux comprendre les effets de la transformation rapide de l’Arctique sur les ours polaires, toutefois, et pour mieux gérer leurs populations, les scientifiques et les décideurs ont besoin d’informations plus fréquentes provenant de partout dans l’Arctique.
Cette demande croissante de données à jour et les limites de la recherche ont amené un groupe de partenaires œuvrant dans l’Arctique à mettre en commun leurs ressources pour essayer une nouvelle formule de recensement des populations d’ours polaires à l’aide d’imagerie satellitaire.
Nous avons entamé cette démarche en août et septembre 2012 par une collecte d’images de l’île Rowley, dans le bassin Foxe, au Nunavut. Nous avions choisi cette région parce que le terrain y est relativement plat et que les ours polaires s’y regroupent en grand nombre à la fin de l’été, quand il n’y a pas de neige au sol et que les conditions sont optimales pour un tel projet pilote. Nous avons ensuite consacré de nombreuses heures à l’examen détaillé de ces photos afin d’y distinguer les ours polaires, puis nous avons comparé nos résultats à un décompte aérien qui s’était fait au même moment par hélicoptère.

Polar-Bear-Example-1-600x600Polar-Bear-Example-2a-Bear-600x600Images satellitaires en haute définition ayant servi à compter les ours polaires sur l’île Rowley, dans le bassin Foxe, au Nunavut, à la fin de l’été 2012. Les ours polaires sont cerclés de jaune. Imagerie gracieusement fournie par Digital Globe, Inc. © 2012.

Cette première étape fut couronnée de succès, les deux recensements ayant donné un résultat semblable, ce qui nous a confirmé que l’on peut identifier précisément les ours polaires grâce à l’imagerie satellitaire. Nous sommes donc passés à la deuxième étape qui consiste à automatiser le processus afin d’abréger ces longues heures d’examen fastidieux des photos et de permettre l’utilisation de cette méthode à plus grande échelle. Nous effectuons aussi des tests pour vérifier l’efficacité de l’imagerie satellitaire dans de moins bonnes conditions. Pour ces essais, nous avons choisi d’autres régions, notamment les îles de Baffin et Bylot où le terrain, plus vaste, est aussi plus accidenté. Bien que le projet soit toujours en évolution, nous obtenons des résultats prometteurs. En identifiant certaines caractéristiques particulières sur les images, par exemple, nous parvenons à différencier automatiquement les ours polaires des autres éléments du paysage. Nous espérons qu’en élargissant la portée de cette méthode, celle-ci se révélera utile aux futures recherches qui coûteront ainsi moins cher et ne menaceront pas la sécurité des travailleurs de terrain ou des ours.
Cet emploi de l’imagerie satellitaire comme outil de suivi pourrait aussi ouvrir la voie à une nouvelle forme de participation des communautés du Grand Nord. En effet, leur connaissance intime du terrain et de la faune qui l’habite fait des gens de la région les meilleurs analystes d’images satellitaires, capables d’y voir d’un coup d’œil les animaux qui s’y trouvent. Cela leur fournirait en outre davantage d’information sur les nombres et la répartition des ours polaires dans leur région.
La phase 2 de ce projet bénéficie du financement de la campagne Habitat Arctique : faites un don d’ici le 15 mars 2014 pour soutenir les projets du Fonds mondial pour la nature dans l’Arctique et Coca-ColaMD versera un montant équivalent à tous les dons faits au Canada et aux États-Unis jusqu’à concurrence d’un million de dollars US.