Réflexions sur la santé de l’eau douce au Canada – ce que nous apprennent les insectes

D’ici 2017, au WWF-Canada, nous comptons évaluer l’état de santé de toutes les eaux douces du Canada. Nous sommes maintenant arrivés au quart du parcours, avec 25% des bassins versants du pays analysés. Nos Bilans de santé des cours d’eau se fondent sur quatre principaux paramètres de mesure de la santé de l’eau : le débit et la qualité de l’eau, les poissons et les insectes. Dans des blogues précédents, nous vous avons parlé des grandes tendances de l’état de santé des cours d’eau, des mesures de débit et de qualité de l’eau, ainsi que des poissons. Aujourd’hui, je veux vous parler du quatrième paramètre, les bibittes! Qu’est-ce que ces bestioles ont à voir avec la santé de l’eau, demandez-vous? C’est ce que nous allons voir.

Au confluent des rivières Liard et Mackenzie, Fort Simpson, Territoires du Nord-Ouest. Les populations d'insectes ont été déclarées en bonne santé dans trois sous-bassins de la région, alors que les données étaient insuffisantes pour analyser les deux autres. © Peter Ewins / WWF-Canada
Au confluent des rivières Liard et Mackenzie, Fort Simpson, Territoires du Nord-Ouest. Les populations d’insectes ont été déclarées en bonne santé dans trois sous-bassins de la région, alors que les données étaient insuffisantes pour analyser les deux autres. © Peter Ewins / WWF-Canada

Nous appelons scientifiquement « macroinvertébrés benthiques » tous ces insectes comme les mouches, coléoptères, vers, sangsues, escargots et autres espèces invertébrées, ainsi que leurs larves, qui vivent au fond des cours d’eau. Ces communautés d’insectes sont très sensibles à tout ce qui influence la santé de l’eau. Par conséquent, en sachant quelles espèces sont présentes ou absentes d’un cours d’eau, nous avons une bonne idée de l’état de santé général d’un écosystème aquatique.
Après avoir examiné un quart des bassins versants du Canada, qu’avons-nous appris des insectes dans nos eaux?
La tendance que l’on remarque le plus couramment est qu’il n’y a pas assez de données disponibles sur ces invertébrés pour mesurer l’état de santé des cours d’eau. Même que, de tous les indicateurs étudiés, c’est celui-là qui fait le plus défaut, sans doute parce que le suivi des populations benthiques – ces espèces qui vivent dans les sédiments du lit des cours d’eau – exige beaucoup de temps, de compétences pointues et de formation, en plus d’être coûteux. Et puis, alors que d’autres programmes de surveillance sont obligatoires, les macroinvertébrés benthiques échappent à cette règle.
Scores d'insectes par bassin versant
Cela ne signifie pas pour autant qu’on ne peut être optimiste. Des sept bassins versants qui présentaient assez de données pour le calcul d’un score, cinq avaient un bon ou très bon score.
À l’échelle locale, plusieurs groupes militent pour l’augmentation de la surveillance. Par exemple, un des projets subventionnés par le Fonds Loblaw pour l’eau, entrepris par les organismes Wildsight et Living Lakes, applique le protocole du Réseau canadien de biosurveillance aquatique (RCBA) pour évaluer la santé du réseau hydrographique de la rivière Flathead en Colombie-Britannique. Ce réseau mis en place par Environnement Canada a mis au point un protocole normalisé afin de favoriser l’établissement et le partage de rapports cohérents, uniformes et comparables parmi les différents groupes de surveillance des cours d’eau. Les participants suivent une formation dans le cadre de ce protocole afin d’assurer le respect des normes du RCBA. Les données qu’ils recueillent sont téléchargées dans une base de données centrale, accessible aux autres organismes comme le WWF-Canada. Voilà un bon exemple de coopération entre divers services et intervenants. Avec l’émergence de nouvelles technologies, le suivi des espèces benthiques devient de plus en plus facile et moins coûteux, ce qui augmente la somme de données accessibles dans les banques de données centralisées.
Tout scientifique sait que l’absence de résultat est quand même un résultat. Nous savons maintenant qu’il existe de grandes lacunes dans les données disponibles sur les insectes. En attirant l’attention sur ce manque, nous souhaitons encourager les nouveaux efforts de surveillance et ainsi alimenter le fonds de données accessibles. En comprenant bien l’état de santé des cours d’eau canadiens, nous pouvons protéger notre eau douce pour les générations à venir.