Climat: Est-ce le début d’un effet domino positif?

Il y a quelques jours, une autre pièce du domino mondial de la lutte aux changements climatiques est tombée, donnant une nouvelle impulsion aux actions positives en ce sens. L’effet d’entraînement se fait déjà sentir dans plusieurs pays autour du globe, mais comment le Canada réagira-t-il?

Plus de 400 000 personnes ont participé à la Marche citoyenne pour le climat à New York le 21 septembre 2014 © WWF-US
Plus de 400 000 personnes ont participé à la Marche citoyenne pour le climat à New York le 21 septembre 2014 © WWF-US

L’annonce à Beijing d’un engagement bilatéral vers l’atteinte de nouvelles cibles de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES), négocié en secret par les deux plus grands émetteurs de la planète – la Chine et les États-Unis – lance un puissant signal politique à la communauté mondiale : un pays perd toute crédibilité s’il ne prend pas de mesures concrètes pour lutter contre les changements climatiques. Cet accord s’inscrit dans la foulée de la grande marche citoyenne pour le climat qui s’est tenue le 21 septembre dernier, à l’occasion du Sommet 2014 sur le climat organisé par l’ONU, où des centaines de milliers de gens ont marché à New York et dans les grandes villes du monde pour exiger que les gouvernements passent à l’action contre les changements climatiques. Par cette annonce, un défi est lancé aux autres pays pour qu’ils entrent dans le jeu et prennent de réels engagements en vue des négociations mondiales sur le climat qui culmineront au Sommet de Paris l’été prochain.
Évidemment, l’annonce de cette entente sino-américaine ne change rien au fait qu’une réduction des émissions de GES à l’échelle mondiale qui permettrait d’éviter des dérèglements climatiques catastrophiques pose toujours un immense défi. Mais, de l’avis de plusieurs, cette coopération entre les deux plus importants émetteurs de GES est une condition préalable à une action plus ambitieuse encore : c’est la première pièce d’un jeu de dominos, celle qui doit tomber pour entraîner les autres et amorcer le mouvement vers l’adoption d’accords mondiaux contraignants.
Qu’est-ce que cela veut dire pour le Canada? Cet effet d’entraînement vers de réelles négociations mondiales sur le climat met en évidence la réticence de notre gouvernement fédéral à passer à l’action. Pourquoi agir alors les plus gros émetteurs ne font rien? disait-on, faisant fi du fait que le Canada est l’un des dix plus grands émetteurs de GES – tant par habitant qu’en chiffres absolus – de la planète. C’était jusqu’à maintenant le principal argument du gouvernement fédéral, une béquille que l’entente sino-américaine vient de lui retirer.
Dans un récent rapport, la Commissaire à l’environnement et au développement durable du Canada fait remarquer que nous ne remplissons pas nos engagements climatiques et que le pays n’atteindra pas les cibles de réduction des GES qu’il s’est fixées. Plus inquiétant encore, nous n’avons même pas de plan global pour atteindre cet objectif national. Réglementation retardée (notamment dans le secteur des hydrocarbures), absence d’évaluation des programmes en place, manque de coordination avec les provinces et territoires, voilà autant de facteurs qui contribuent au constat que la croissance de nos émissions ne pourra être renversée à temps pour atteindre nos cibles.
Il y en a qui ne croient pas aux coïncidences : le lendemain de l’annonce de Beijing, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) publiait son rapport World Energy Outlook 2014 où le manque de volonté politique est cerné comme étant LE principal obstacle à la lutte aux changements climatiques. Le rapport en appelle aux dirigeants politiques de la planète pour qu’ils passent à l’action dès maintenant afin d’empêcher un réchauffement planétaire à haut risque. Si les négociations mondiales de Paris, en 2015, n’accouchent pas de directives claires et contraignantes, soutient le rapport, la planète sera sur la voie d’un réchauffement excédant de beaucoup la cible de 2 ˚C sur laquelle les pays se sont entendus comme maximum viable.
Alors que les plus grands émetteurs du monde s’engagent, que les citoyens exigent des mesures concrètes, que les entreprises passent à l’action et que les agences de l’énergie montrent la voie, il est grand temps que notre gouvernement fédéral embarque dans le mouvement.
Le prochain domino est entre ses mains.