Une sécurité climatique pour la planète : pourquoi sauver l’Arctique signifie sauver la planète

Pour la majorité des Canadiens, l’Arctique représente une contrée lointaine et mystérieuse. C’est la partie romantique de notre histoire et de notre identité. Cette beauté froide et sauvage nous rend fiers, mais que savons-nous d’elle réellement?
L’Arctique devrait jouer un rôle bien plus important dans notre conscience collective. À elle seule, elle occupe 40% de la surface terrestre canadienne et le 2/3 de notre littoral. C’est le territoire des Inuits, qui y vivent depuis des milliers d’années, ainsi que d’espèces remarquables – comme les ours polaires et les narvals. La plupart de ces espèces ne se retrouvent nulle part ailleurs sur la planète.

Small icebergs float near the coastline under a cloudy sky in the eastern Arctic, Canada.
De petits icebergs flottant au large des côtes à l’est de l’Arctique, Canada. © Zoe Caron / WWF-Canada

Faisant face à des enjeux comme les changements climatiques, le développement des secteurs gazier et pétrolier extracôtier et le trafic maritime, l’Arctique est souvent considéré comme une victime, comme un endroit que nous devons sauver. Pourtant, l’Arctique est un héros produisant d’inestimables bénéfices tant aux Canadiens qu’aux citoyens du monde entier.
C’est vrai! Conserver l’Arctique gelé est notre sécurité climatique pour la planète. Il régule les températures, présentant un schéma météorologique constant et prévisible d’année en année. Par la réflexion de la chaleur sur la terre, il a conservé les niveaux de la mer à des niveaux bas et constants depuis des milliers d’années. En réfléchissant la lumière solaire (effet albédo) et en séquestrant le carbone dans les glaces marines et le pergélisol, il nous protège d’un rythme éventuellement beaucoup plus rapide de réchauffement climatique.
Malheureusement, les changements climatiques altèrent grandement ces caractéristiques résilientes. L’été 2015 a battu des records de chaleur et la banquise d’été dans l’Arctique a été la quatrième plus petite jamais mesurée (les dix niveaux les plus bas ont tous été enregistrés dans les dix dernières années). Et ce n’est pas seulement l’été, car l’hiver 2014-2015 a battu un triste record, celui de la plus petite étendue maximale de la banquise.

Chunks of broken, melting icebergs floating on the water at Resolute Bay, Qikiqtaaluk Region, Nunavut, Canada
Parties d’icebergs brisés qui fondent et flottent dans les eaux de la baie Resolute, région de Nunavut, Canada. © Andrew S. Wright / WWF-Canada

L’Arctique fond. Et forcément, notre stabilité globale ne repose plus sur des bases aussi solides.
La fonte de la banquise et des glaciers mènent à une augmentation du niveau de la mer. Cette situation s’accélérera dans les 100 prochaines années, menant à une augmentation de plus de 50 cm d’ici 2100, causant la relocalisation de millions de réfugiés climatiques.
Imaginons un instant l’Arctique comme un climatiseur qui modère les températures de l’air et des océans. En se réchauffant, l’Arctique arrêtera de rafraîchir le reste de la planète. Et un océan plus chaud risque d’influencer la fréquence et l’intensité d’évènements climatiques extrêmes.
La fonte du pergélisol amplifie aussi le réchauffement climatique. Le pergélisol renferme des matières organiques qui se décomposent rapidement lorsque fondues, dégageant assez de carbone pour doubler la concentration de dioxyde de carbone dans l’atmosphère.
L’accroissement des niveaux de la mer, l’augmentation de la fréquence et de l’intensité des événements climatiques extrêmes et l’effet en boucle rétroactive du changement climatique sont les impacts directs de la fonte de l’Arctique, qui générera inévitablement une situation instable autour du monde.
Évidemment, ces menaces globales s’additionnent aux menaces auxquelles font face les espèces et les communautés de l’Arctique. Ils doivent s’adapter à une banquise de plus en plus étroite et à sa fonte imprévisible, elle qui leur est pourtant fondamentale pour chasser, pour survivre.
C’est pourquoi sauver l’Arctique, c’est aussi se sauver nous-mêmes : la planète entière, littéralement, dépend de l’Arctique.