Étoiles du Nord : les biologistes de la faune arctique du WWF passent de la recherche à l’action

La science et les connaissances traditionnelles mises ensemble pour un environnement en santé et une économie fleurissante dans le Nord
Rachel Théoret-Gosselin habite à Iqaluit au Nunavut et dirige les projets de conservation de mobilisation des communautés du WWF-Canada pour le Dernier refuge de glace, l’archipel du Haut-Arctique canadien qui devrait pouvoir conserver sa banquise d’été le plus longtemps face aux changements climatiques. Vous pouvez soutenir le travail de Rachel avec les communautés et la conservation en milieu terrestre et marin en soutenant la campagne Habitat arctique du WWF. De plus, en donnant avant le 31 mars 2016, vous doublez votre impact puisqu’un donateur anonyme égalera la somme de votre don jusqu’à 137 000 $.

© Rachel Théoret-Gosselin

Nom : Rachel Theoret-Gosselin
Âge : 30
Nombre d’années en Arctique : Deux
Quelle est votre expertise de recherche en Arctique?
Rachel : je savais que je voulais travailler avec les animaux depuis que je suis toute petite, alors j’ai d’abord fait un baccalauréat en biologie de la faune à l’université McGill pour ensuite compléter une maîtrise dans le même domaine à l’université Laval. Mon mémoire portait sur le comportement maternel des chèvres de montagne et la survie de leurs petits dans les montagnes Rocheuses en Alberta. Bien que techniquement considéré comme subarctique, l’habitat froid et alpin de la toundra dépourvue d’arbres était très similaire à ce que l’on retrouve en Arctique.
J’ai déménagé à Iqaluit avec mon copain après avoir fini mes études et j’y habitais depuis un an avant de commencer à travailler avec le WWF. Vivre à Iqaluit est spécial. Le rythme de vie est différent de celui au Sud. Tout y est plus simple. Mais à la fois plus compliqué.
Qu’est-ce qui vous fait aimer vivre dans le Nord?
Rachel : J’aime tellement l’environnement relié à la toundra. Ça peut sembler austère, mais quand on s’arrête et qu’on prend le temps de regarder autour de nous, l’odeur, les couleurs sont étonnantes. En vivant à Iqaluit, vous avez la toundra et la baie dans votre cours. La nature est juste à côté.

Communauté d’Iqaluit sur la baie de Frobisher, île de Baffin, Nunavut, Canada. © Peter Ewins / WWF-Canada
Communauté d’Iqaluit sur la baie de Frobisher, île de Baffin, Nunavut, Canada. © Peter Ewins / WWF-Canada

Pouvez-vous nous raconter une expérience qui démontre que vivre dans le Nord comporte certains défis?
Rachel : Je trouve la noirceur difficile. Je suis une personne de soleil, alors en été, je n’ai aucun problème à avoir du soleil toute la nuit. Mais en hiver, l’éclaircie qui dure de 10 h à 14 h n’est pas suffisante.
En ce qui concerne les communautés, il y a certaines structures ou certains services qui ne sont pas encore mis en place. Par exemple, certaines organisations et plusieurs services n’ont pas de site Internet parce que la connexion Internet est trop lente. Ce qui fait que vous devez connaître quelqu’un qui connaît quelqu’un dans l’organisation si vous voulez obtenir l’information que vous cherchez. En tant que mère de deux enfants, un des plus grands défis a été de trouver un service de garde. Les listes d’attente pour les garderies sont vraiment longues, comme dans plusieurs régions du Canada. Ici, l’attente peut être aussi longue que quatre à cinq ans. Ce n’est pas réaliste, alors vous devez vous adapter et créer vos propres solutions.
Sur quoi travaillez-vous avec le WWF?
Rachel : En tant que biologiste, c’est un rêve de travailler pour le WWF! Alors qu’à l’école j’étais dans l’académique et la recherche, je voulais vraiment passer à l’action et obtenir des résultats concrets. C’est ce que j’aime au WWF, on combine la recherche et l’action.
Un de mes projets principaux est de soutenir les préoccupations environnementales et les actions des communautés nordiques. Souvent, lorsque des décisions concernant de nouveaux développements sont prises, les membres de la communauté n’ont pas tous les outils pour comprendre les menaces et les risques auxquels ils feront face. Le WWF peut aider les communautés à atteindre un équilibre entre un développement économique et un environnement sain en les aidant à se préparer à ces réunions communautaires.
Les consultations communautaires qui ont lieu à Chesterfield sur le transport maritime pour une mine avoisinante est un bon exemple de ce soutien. Les membres de la communauté ont observé une diminution des mammifères marins dans la région avec l’augmentation de la navigation. Le WWF travaille avec eux pour à la fois cartographier les aires qu’ils savent importantes et pour développer la recherche scientifique qui les aidera à évaluer les bénéfices et les risques du développement industriel dans cette région.
La science peut donner plus de crédibilité aux communautés dans ces négociations, mais le rôle des savoirs ancestraux est indéniable dans la prise de décision. Les études scientifiques dans le Nord sont en majorité menées en période estivale et sont de courte durée. Mais les gens sont sur cette terre tout le temps. Les Inuits n’ont pas peur du froid ou de la noirceur. Ils y sont depuis des milliers d’années. Ils ont vécu les cycles et les saisons et ont une connaissance de certaines particularités impossible à observer ou documenter pour la science. Nous pouvons utiliser ce savoir pour expliquer les particularités dont la science ne saurait encore expliquer.
En s’appuyant à la fois sur le savoir traditionnel et sur la recherche scientifique, nous nous assurons que les aires les plus fragiles sont protégées, que les nouvelles opportunités économiques importantes peuvent coexister avec les écosystèmes, les espèces et les communautés qui sont ici depuis des millénaires.
Allez lire le précédent billet Étoiles du Nord pour faire la connaissance d’une autre chercheuse au WWF!